Stimuler l’économie par des bons de croissance

Dans un contexte de reconstruction économique, les gouvernants lancent des programmes d’aides publiques afin de soutenir de nouvelles consommations et adapter l’appareil de production.

Comment ajuster les dispositifs de relance au plus près des citoyens et cibler les dépenses des secteurs adéquats ? Nous entrons dans une reconfiguration de l'offre à la demande des biens et services réels.

Contexte initial

La puissance publique est préoccupée par la transmission des politiques publiques afin d’atteindre les objectifs visés. La crise du Covid montre que l’action et la dépense publique ne sont pas efficaces sans une répartition des fonctions, des tâches, des rôles et des responsabilités entre les décideurs publics, les professionnels et les acteurs individuels. Le politique a besoin d’un dialogue permanent avec le citoyen, le consommateur et tous les producteurs afin d'ajuster les objectifs publics en accord avec les choix sociétaux.

Parmi une série d’aides publiques, des incitations financières sont directement adressées aux citoyens : chèque réparation-vélo, bons d’achat aux salariés, forfait mobilités douces, prime énergie... Afin de stimuler des secteurs d’activités stratégiques, les responsables politiques cherchent à affiner ces mesures au plus près des échanges de l’économie réelle. Les leviers d’actions devront permettre de mesurer la performance d’une politique, d'améliorer l’allocation des subventions et le financement de l'action publique.

Sans attendre la présentation du prochain plan de relance par le gouvernement, il est urgent de récupérer les indicateurs fournissant une connaissance réelle des échanges entre l'offre et la demande. Afin d'aiguiller les mesures publiques, il faut les outils capables de produire en temps réel un flux-retour d'informations. Et pour mesurer l’exploitation de la consommation, l'identification systématique du bien ou service effectivement livré entre les parties prenantes à une transaction sera nécessaire.

Problèmes multiples

Coté consommateurs, les conditions réelles pour bénéficier d’une aide sont illisibles. Sur l’exemple du chèque réparation-vélo1, réaliser les démarches d'obtention n’indique pas dans le détail les prestations comprises dans l'aide. Par exemple, Pierre voudrait recycler des vélos inutilisés dans une ressourcerie, Mathieu changer autre chose qu’une chambre à air ou des plaquettes de frein et Alexandre acheter un vélo avec un rabais de 50€ pour se remettre en selle. De la validation de l'éligibilité exigeant de se préinscrire, de trouver un vélociste et de réserver un créneau, jusqu’au paiement final chez le réparateur, le consommateur n'a qu'une vague idée de ce dont il bénéficie.

Côté institutions, peu de métriques permettent d’ajuster en temps réel les politiques publiques en fonction des besoins et des attentes tangibles. L’Etat doit sous-traiter la mise en œuvre de ses programmes d'aide à des organismes intermédiaires2 qui en assurent la distribution. Or si en amont les pouvoirs publics restreignent trop les finalités ou les objectifs d’une mesure, l’équilibre des dépenses et des recettes risquent de ne pas être atteint, sans aucune possibilité d'ajustement entre temps. Il manque un outil basé sur des indicateurs de performance politique (IPP) afin d'orienter tactiquement et à chaque instant une mesure publique déjà lançée.

Côté professionnels, il faut s’enregistrer en amont afin de participer aux programmes de subventions. Peu outillées pour traiter la charge administrative3, les TPE doivent subir les délais de trésorerie, allant parfois jusqu’à deux mois pour les premiers versements, alors qu’elles n’ont pas de capital liquide. Il s’agit d’un décalage temporaire économiquement injustifié entre le bon de réalisation et de livraison d’une prestation réelle. Afin que des intérêts puissent être alignés dans le temps autour de finalités politiques, il faut conçevoir un processus d’échange informationnel novateur, pour que le rôle des acteurs économique aille vers une coordination du financement et de la production.

Solution viable

Les aides financières publiques doivent garantir droit d'information au public et usage renforcé grâce à un déploiement par interface numérique. Point important, ces aides sont programmables en amont afin de n’être dépensées que dans les conditions préalablement établies : montant, objet, prestataire, bénéficiaire... Plus encore, les critères d'utilisation peuvent être continuellement affinés même si les aides ont déjà été distribuées, ce qui permet d'intégrer les demandes provenant des acteurs de l'économie réelle.

Un vecteur d’information capable d’optimiser les interactions avec les aides publiques, à la fois physique et digital, est celui du flashcode (QR code). En 2 clics, n’importe quelle personne équipée d’un téléphone avec appareil photo peut authentifier et des données. À ce standard informationnel s'incorporent des règles de vérification cryptographiques qui assurent l'incorruptibilité des échanges. On peut donc parfaitement prévoir et cibler les dépenses futures qui seront effectuées par les agents économiques.

Ce dispositif se matérialise comme un bon d'achat en version numérique, nommé bon de croissance. Un jeu relationnel s'organise : le consommateur bénéficie d’une aide financière dans les meilleures conditions, le professionnel se fait payer par l’État le plus vite possible et les organismes publics récoltent des données stratégiques par l’adressage de l’information. Enfin, ce processus de liquidation de la valeur accorde une visibilité supplémentaire à chaque acteur dans la maîtrise de ses activités.

Enjeux d’acceptabilité

Si un bon de croissance est dépensable à la manière d’un billet de banque ou d’une carte de crédit, la praticité ne doit estomper sa caractéristique première : la dépense ciblée. Le bon numérique est nominatif, il est un droit personnel reconnu sur la base d’une vérification formelle d’une identité. Concrètement, la collectivité peut savoir comment les individus matérialisent leurs droits et vérifie la conformité des dépenses personnelles. Ces statistiques sont un surcroît d'informations collectables par la puissance publique, au plus proche des réalités entre consommateurs et professionnels.

Le consommateur prudent et responsable n’est pas juste à la recherche de petits profits. Il est un citoyen qui souhaite comprendre pourquoi ce qui lui est adressé est bénéfique tant pour lui que pour la société. Il saisira la réalité du bien ou du service qui lui est proposé sous forme d'aide publique si elle répond à l’intérêt général ou vise une communauté à laquelle il s’identifie. Sur le modèle des campagnes citoyennes, ces aides financières doivent mobiliser les comportements engagés. Des objectifs politiques clairs devront être énoncés et leur progression publiée en temps réel.

C’est un défi de taille pour la puissance publique que la constitution d’écosystèmes de valeurs où les droits des personnes sont effectivement protégés et satisfaits. Ce processus peut établir un cadre de confiance direct entre les agents économiques et la puissance publique. Cette dernière peut ainsi démontrer au citoyen qu’elle est à son service, qu’elle prend en compte ses choix et répond à ses besoins. Les données qui viennent en garantie de la protection publique sont émises par tout acteur participant à ces campagnes de rebond économique, créant une chaîne causale d’informations par le bas.

Usage d’expérience

Toute interaction vient renforcer la dimension sociale du flashcode, lequel est utilisable aussi simplement qu’un contenu de type image. Le diffuser à grande échelle est aisé puisqu’il peut être imprimé et placé sur support physique comme un panneau d’information, une publicité dans le métro, ou une vitrine de magasin. En ligne, il peut être relayé par un simple post sur les réseaux sociaux, par courriel, voire même activé depuis un téléviseur pendant le JT de 20h.

Illustration à titre d'exemple

Pour bénéficier du bon #SolutionVélo, il suffirait que le citoyen pointe le flashcode avec son téléphone en mode caméra pour récupérer son bon. Pour l'entreprise effectuant la réparation, flasher le bon présenté par un client lui permet de produire une preuve numérique auprès de l’administration afin de recevoir la subvention dans les plus brefs délais. Et pour l’administration, c’est une collecte de données professionnelles fiscalement normées afin de piloter l’action publique relative à un domaine délimité.

Pratiques politiques

L’Etat pourrait diffuser en cascade des aides en laissant les citoyens organiser eux-mêmes la distribution. Par exemple, un employeur souhaitant inciter ses salariés à adopter des modes de transports durables générera lui-même les bons « mobilités douces ». Il n’aura qu’à rentrer quelques informations que valideraient ses employés par leur identité afin d'apporter la preuve à l'administration et créditer la bulletin de salaire. Un salarié conquis pourra même faire la promotion du dispositif à ses collègues en leur transférant un bon unique prêt à l'emploi.

Une autre mesure qui passe par le biais des entreprises est celle des titres cadeaux. Des expérimentations pour soutenir la production locale sont déjà appliquées par les collectivités4. Configurables, ces bons d'achat aux salariés pourraient concerner uniquement les produits français afin d'aider le commerce de proximité pour certaines communes. Et pour sauvegarder des emplois, l’État pourrait même planifier stratégiquement des commandes publiques auprès d'entreprises par des bons destinés à vitaliser la production.

Enfin, une pratique pourrait concerner les subventions accordées aux associations. Une opacité dans les frais de fonctionnement de certaines structures freine les dons de la part des particuliers et des entreprises. Un don qui peut être traçé depuis son donateur, de même que le financement vérifié par les acteurs publics, voilà qui redonnerait confiance dans le tissu associatif. Les collectivités pourraient même proposer un budget participatif afin que les citoyens attribuent en toute transparence les subventions aux projets associatifs qu'ils estiment les plus pertinents.

Sources :

¹ Coup de pouce vélo

² Fédération française des usagers de la bicyclette

³ Mesure inadaptée au professionnel

Titre-cadeau à Marseille

Published 3 années plus tôt